Farcesque, clownesque et léger, comme ces dizaines de ballons multicolores qui jonchent la scène et s'élèvent dans les airs de la Volksbühne, l'Ubu roi de Dimiter Gotscheff penche plus vers le comique que le goût de la provocation, dans une version très librement adaptée. Demain soir à la Volksbühne On a bien entendu le retentissant et célèbre "Scheiße" ("merde" et non pas "merdre" comme chez Jarry) dès le début. Mais qui de ces deux hommes nus sur la scène est le père Ubu? Dimiter Gotscheff semble vouloir nous rejouer Adam et Eve dans une forêt de ballons multicolores. On craint l'effet Volksbühne des grandes heures. Encore du nu, encore du trash, un peu gratuit. Et puis non, tout ça s'avère finalement très poétique, léger et drôle. Petit pincement de sein à la Michelangelo, grimaces de clown, un moment de grâce presque sans parole. Petit à petit l'homme-pas-encore-femme, cache son sexe entre des jambes croisées, cambre la ligne du dos, cligne des paupières. Il saisit le sexe de l'autre qui n'est autre que son cœur. Il devient femme, il est Mère Ubu.
Couple miroir
Dorénavant ils seront couple grotesque et fantasque, duo inséparable et à peine dissemblable. Même costume noir masculin et strict, mêmes talons hauts rouges et vernis. Le numéro de duettiste est tout à fait enthousiasmant. Samuel Finzi et Wolfram Koch explorent avec une jouissance palpable le registre clownesque, dadaïste et surréaliste. Que ce couple miroir échange à mi-parcours les rôles de père et mère Ubu ne constitue qu'une pirouette de plus. Les mots se dégustent en version amplifiée ou non. Le temps d’un menu à rallonge, mère Ubu passe au français. Ridicules et assoiffés de pouvoir grotesques et grandioses, grossiers et criminels, le couple ne nous est jamais antipathique. Gotscheff les traite avec sympathie, comme des monstres gentils, auxquels on sait gré d’avoir su se foutre du bon goût et des bienséances.
La scénographe Katrin Brack n’a rien laissé sur scène à l'exception de ces ballons de toutes tailles, qui se font tour à tour accessoires, armes meurtrières, jouets, décor, ou personnages. Comme des bulles de bande dessinée, ils flottent parfois au-dessus des têtes, montent et descendent par on ne sait quelle opération. La pièce se déguste comme autant de ces bonbons légers et multicolores. Le goût de la provocation et du scandale qui habitaient l’Ubu de Jarry n’apparaissent plus que très flou en arrière-fond. Gotscheff a choisi la farce plutôt que le brûlot. La poésie plutôt que la violence.
Un peu de Shakespeare et de Müller
Le réalisateur d'origine bulgare, tant salué par la critique l'an dernier pour son Ivanov, prend également de très grandes libertés avec le texte initial de Jarry, sans négliger tout de même pas de distribuer des « Scheiße » à tour de bras. Exit les actes où Père Ubu part au combat, la pièce est un condensé d'où plusieurs scènes manquent avec aussi quelques rajouts : un zeste de Shakespeare et des extraits de McBeth) et un soupçon de Heiner Müller, pour l'ouverture et la clôture. Nous étions prévenus, cet Ubukönig était monté d'après Jarry, réécrit par Maurici Farré et monté à "la manière de la Volksbühne". Autant dire un roi de troisième main, mais dont l'esprit n'est pas trahi. Cette pièce, jouée pour la première fois à Paris en 1896 non sans provoquer un grand scandale, ne pouvait-elle être lue comme une parodie de Shakespeare, et une sorte de manifeste surréaliste. Cette ligne est toujours d'actualité dans la mise en scène de Gotscheff. Tout en laissant place à l'imagination et la modernité.
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Couple miroir
Dorénavant ils seront couple grotesque et fantasque, duo inséparable et à peine dissemblable. Même costume noir masculin et strict, mêmes talons hauts rouges et vernis. Le numéro de duettiste est tout à fait enthousiasmant. Samuel Finzi et Wolfram Koch explorent avec une jouissance palpable le registre clownesque, dadaïste et surréaliste. Que ce couple miroir échange à mi-parcours les rôles de père et mère Ubu ne constitue qu'une pirouette de plus. Les mots se dégustent en version amplifiée ou non. Le temps d’un menu à rallonge, mère Ubu passe au français. Ridicules et assoiffés de pouvoir grotesques et grandioses, grossiers et criminels, le couple ne nous est jamais antipathique. Gotscheff les traite avec sympathie, comme des monstres gentils, auxquels on sait gré d’avoir su se foutre du bon goût et des bienséances.
La scénographe Katrin Brack n’a rien laissé sur scène à l'exception de ces ballons de toutes tailles, qui se font tour à tour accessoires, armes meurtrières, jouets, décor, ou personnages. Comme des bulles de bande dessinée, ils flottent parfois au-dessus des têtes, montent et descendent par on ne sait quelle opération. La pièce se déguste comme autant de ces bonbons légers et multicolores. Le goût de la provocation et du scandale qui habitaient l’Ubu de Jarry n’apparaissent plus que très flou en arrière-fond. Gotscheff a choisi la farce plutôt que le brûlot. La poésie plutôt que la violence.
Un peu de Shakespeare et de Müller
Le réalisateur d'origine bulgare, tant salué par la critique l'an dernier pour son Ivanov, prend également de très grandes libertés avec le texte initial de Jarry, sans négliger tout de même pas de distribuer des « Scheiße » à tour de bras. Exit les actes où Père Ubu part au combat, la pièce est un condensé d'où plusieurs scènes manquent avec aussi quelques rajouts : un zeste de Shakespeare et des extraits de McBeth) et un soupçon de Heiner Müller, pour l'ouverture et la clôture. Nous étions prévenus, cet Ubukönig était monté d'après Jarry, réécrit par Maurici Farré et monté à "la manière de la Volksbühne". Autant dire un roi de troisième main, mais dont l'esprit n'est pas trahi. Cette pièce, jouée pour la première fois à Paris en 1896 non sans provoquer un grand scandale, ne pouvait-elle être lue comme une parodie de Shakespeare, et une sorte de manifeste surréaliste. Cette ligne est toujours d'actualité dans la mise en scène de Gotscheff. Tout en laissant place à l'imagination et la modernité.
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